28 juin 2008

J+227-233 / Incroyables colombiens Episode II

Le lendemain très tôt, nous prenons un minibus et nous retrouvons sans souci notre famille colombienne : le fils, la mère, la grand-mère et une amie. Trois heures plus tard nous arrivons à San Augustin où nous trouvons un hôtel sympathique, tout en bois avec une grande cour intérieure. Nous laissons nos affaires et partons pour visiter le site archéologique. Beaucoup de monuments funéraires dispersés dans la forêt, composés de têtes monolithiques, gardant l´entrée des tombes, plus loin sur le parcours nous trouverons une place sculptée dans la roche de la rivière, un lieu que sans doute les sages utilisaient pour différentes cérémonies. Il y a peu de traces de cette culture qui aurait habité la région il y a environ un bon millier d´années. Alors que nous nous installons dans notre chambre, Socorro la grand-mère de Jorge vient nous voir pour nous proposer de continuer avec eux demain matin au chant du coq pour visiter les autres ruines de la région et une cascade puis continuer la route en direction de Popayan plus à l´ouest. Commençant vraiment à être fatigués, nous déclinons l´offre. Le temps de prendre notre douche et de nous rafraîchir le cerveau par la même occasion, nous changeons d´avis, nous apprécions leur compagnie et il serait trop bête de ne pas profiter de l´opportunité qu´ils nous offrent de visiter la région très difficilement accessible en bus. Nous les rejoignons pour le dîner et leur exprimons notre changement de cap : grand sourire de Socorro qui nous lâche une petite boutade au passage. Le seul souci c´est qu´entre temps ils ont proposé à un couple de colombiens rencontrés la veille le même parcours et qu´ils ont été plus prompt que nous, pas grave pour Jorge nous serons donc huit dans le 4x4. Une petite ballade nocturne dans les rues tranquilles de cette paisible bourgade de la cordillière centrale, arrêt pour boire un coup, une pause dans une petite échoppe touristique et chacun rejoint sa chambre. Rendez-vous demain à l´aube.Chacun se réveille un peu en retard et le temps de rameuter tout le monde, le ciel est déjà bien clair. Notre place de retardataire nous vaut d´être dans le coffre, 30 cm de large et 1,50 de long. Rapidement nous commençons à goûter les plaisirs des pistes caillouteuses. Tout au long de la journée nous découvrons différents sites archéologiques, passant par des villages paumés où le règne de la charrette et du mulet est bien loin d´être oublié ; admirant les cascades qui foisonnent dans la région et nous arrêtant dans toutes les églises. Bref malgré notre position tape-cul, que du bon !!! A la nuit tombée toute la compagnie rejoint San Augustin, le couple de colombiens retrouve leur voiture et nous nous mettons en route pour une ville à une heure d´ici où nous passerons la nuit, avant de repartir très tôt pour Popayan à plus de cinq de route. En arrivant á l´hôtel voyons qu´il n´est pas dans notre standing mais nous ne voulons pas faire hôtel à part, d´autant que le départ aura lieu à l´aube, alors nous discutons un peu le tarif. Nous aurons ce que nous voulons mais nous devrons nous passer d´eau chaude, pas grave nous avons fait la campagne d´Afrique ! Au moment de partir, nous allons payer notre nuit d´hôtel mais le garçon nous dit que la note est déjà réglée. Nous allons voir Socorro pour lui donner l´argent pour notre nuit et nous recevons un refus sans appel et nous envoie charger nos affaire dans le coffre de la voiture. Le moteur démarre, nous ne sommes plus que cinq dans le 4x4, trois de nos compagnons nous lâchent aujourd´hui pour rejoindre Neiva. Pendant une bonne heure nous profitons du macadam, cela ne dure pas et après avoir pris notre desayuno (petit-déjeuner) à la mode locale dans un petit bled de la cordillère centrale nous abordons la piste. Le soleil brille, derrière nous s´élève la poussière, Jorge pied au plancher dévoile toute la puissance de son 4x4 V8, le décor défile, nous mangeons les kilomètres comme un mustang lâché dans les hautes plaines. Contrairement aux autres routes colombiennes, nous notons rapidement l´abscence de policiers, explication de Jorge : nous sommes en pleine zone de guérilla, mais ne vous inquiétez pas en ce moment c´est calme... C´est ce moment que choisit la voiture pour montrer une légère faiblesse, rien de grave une simple crevaison. Mais sur les 5 écrous qui verrouillent la roue, deux sont cassés ; nous repartons et abandonnons la vitesse mustang pour adopter la vitesse mulet. Plus que cinq heures avant de rejoindre Popayan. Sur la route, un ancien pont détruit par la guérilla, un village où l´on peut observer un nombre incroyable d´éclats de balles décorant les murs, tristes guirlandes. Heureusement tout n´est pas que guérilla et vendetta, nous passons aussi par une magnifique cascade et par un plateau où de très étranges plantes poussent dans un terrain spongieux et ne grandissent que d´un centimètre par an. On raconte dans les pueblos qu´il y a bien longtemps on en voyait de plus de 30 mètres, la plus grande que l´on ait vue faisait à peine 2 mètres. La pluie arrive en même temps que nous sur Popayan, magnifique cité aux murs blancs, tuiles rondes et rouges sur laquelle pèse aujourd´hui lourdement le gris du ciel. Le temps que la famille se signe devant une église et nous reprenons la route pour Cali, nous pensions nous arrêter dans la cité, mais le temps presse et la famille continue au nord sur la même route que nous alors sans trop résister nous avons accepté leur invitation. Naturellement nous finissons notre route dans la chambre d´amis de Jorge à Santa Rosa. Je pense maintenant que le kidnapping est profondément ancré dans la culture colombienne. Je rappelle les faits : nous faisions du stop au bord d´une piste asséchée et poussiéreuse, nous sentions aussi fort qu´un fromage de bouc, ils ont eu la gentillesse de nous avancer de quelques kilomètres et nous voilà trois jours plus tard invités chez eux à dormir. Incroyables colombiens. Nous passerons trois jours dans cette région caféière. Nous visiterons Pereira, Arménia et nous goûterons au cinéma colombien sans doute l´un des meilleurs d´amérique latine : "Pero come Pero". Nos charmants ravisseurs finissent par nous relâcher après une semaine de prise d´otage plus qu´agréable. Et nous voilà dans un bus direction d´Ibague pour finir notre boucle de la partie sud de la Colombie. Rafael est revenu des Etats-Unis et nous attend pour un bon expresso. Sur son conseil nous passons par un parc dédié au café, nous y affinons notre savoir et repartons direction son accueillante maison.

23 juin 2008

J+224-226 / Interlude : un désert sous la pluie

Le minibus ralentit, nous descendons et récupérons nos bagages. A la croisée des chemins, nuit noire et chaude. Nous marchons jusqu´au centre d´Aipé, le temps de transpirer mais point trop. Nous trouvons l´hôtel que nous a recommandé Rafael sans difficulté. Une vieille dame se balançant dans son rockincher nous accueille la clope au bec et grand sourire. Elle appelle sa fille qui nous indique une chambre dans le fond de la cour. Le prix est bon, l´endroit agréable et il y a un ventilateur. Nous nous installons, fumons une tige avec la grand-mère et partons dans le village en humer l´atmosphère et elle est aussi bonne que la bière que nous prenons fraîche à la terrasse d´un troquet qui donne sur la place principale. Nous glanons quelques infos pour rejoindre le désert del Tatacoa, il nous faudra prendre demain matin une barque pour traverser le Rio Magdalena pour atteindre Villavieja un village sur l´autre rive où commence le désert. Nous demandons si nous pouvons laisser nos gros sacs à l´hôtel le temps de notre petite traversée du désert, cela ne pose évidemment pas de soucis, contrairement à l´hôtel où nous avions dormi au Vénézuela qui nous avait allégé de quelques centaines de bolivianos pour le même service. Après une bonne nuit de sommeil sous les bons hospices du ventilateur et un bon petit déjeuner, nous partons en direction du port d´Aipé pour nous rendre sur l´autre rive. Rapidement nous sortons du village et nous retrouvons sur un sentier inondé où n une dame qui loge régulièrement des voyageurs, malheureusement elle reste introuvable. Finalement il nous propose gentiment de nous héberger et nous allons avec lui jusqu´à sa demeure. Dans le salon sa femme hypnotisée par la télé nous salut à peine. La chambre se résume à la plus simple expression, un lit au milieu de quatre murs en parpaings recouverts d´une taule ondulée. Ce sera très bien pour passer la nuit, surtout que nous voulons nous lever bien avant l´aube pour voir le soleil se lever sur le désert qui est une heure demie de marche du village. Nous visitons le musée archéologique, où nous pouvons admirer de très beaux spécimens de fossiles de tortues datant de l´âge où la mer recouvrait la région. Ensuite nous nous rendons à pied à l´observatoire astronomique qui se situe près du laous devons passer de pierre en pierre pour nous garder au sec. Après avoir traversé un champ, nous sommes en vue du port : un banc sur le bord de la rive à l´ombre d´un arbre plusieurs fois centenaire. Trois colombiens attendent près de leur moto. Nous attendons le bateau qui mettra une bonne heure pour venir. Plutôt qu´un bateau, c´est une barque en bois à moteur qui pointe à l´horizon. Nous embarquons et la moto avec nous, espérons juste que nous ne chavirerons pas car le Rio Magdalena est large et puissant en cette saison des pluies. Sans encombre nous débarquons dix minutes plus tard sur l´autre rive. Le soleil est déjà puissant, et nous arrivons en sueur jusqu´à la place centrale largement désertée à cette heure. Nous allons dans l´unique restaurant-hôtel de la ville, très beau bâtiment colonial. Nous prenons un solide repas et nous demandons pour une chambre, malheureusement l´hôtel est complet. Le garçon se renseigne et nous renvoie versbyrinthe de Cusco qui marque le début du désert. Nous partons malheureusement un peu tard et nous manquons le couché du soleil, mais nous ne manquerons pas de voir saturne par l´oeilleton de la lunette astronomique. Nous retournons au village dans la chaleur de la nuit. Heureusement l´astronome qui rentre lui aussi au village en moto-taxi nous prend en stop à mi-chemin. Mais à peine quelques centaines de mètres plus loin un car de touristes remplit de filles s´arrête à notre hauteur. Notre astronome au grand coeur nous abandonne et nous finissons la course en solo. Nous rejoignons notre piaule ; réveil dans 4 heures. Deux heures après nous être endormis nous sommes réveillés brutalement par une pluie diluvienne. Le bruit est incroyablement amplifié par la taule. Espérons que la pluie cessera, nous nous rendormons. Mais ce n´est pas le cas quand le réveil sonne, la pluie a diminuée mais n´a pas cessée. Notre marche vers le désert commence sous la pluie, nous serons peu chanceux, la pluie ne s´arrête pas et nous ne verrons pas non plus le levé du soleil sur le désert. Sensation étrange que d'aller dans un désert alors que nous sommes trempés, c'est comme se promener au pôle nord en maillot de bain. Sur cette déception, nous prenons un solide petit déjeuner et nous nous mettons en route pour notre longue marche, en espérant que la pluie cesse, c´est tout de même incroyable un désert sous la pluie. Petit à petit nos chaussures se transforment en plateformboots se chargeant d´une boue gluante, elles prennent du poids à chaque pas que nous faisons. Nous avons encore bien 5 heures de marche avant d´atteindre une piscine naturelle qui se trouve au creux des canyons du désert del Tatacoa. Heureusement à mesure que la journée s´écoule, le temps change, les nuages s´en vont et la chaleur commence à venir, enfin ! Il ne nous faudra pas longtemps pour s´en plaindre en bon français que nous sommes. Nos tee-shirts n´ont pas même le temps de sécher de la pluie matinale qu´ils sont trempés de sueur. Rapidement le niveau d´eau de nos gourdes baisse. Il est midi, et nous comprenons enfin pourquoi nous sommes dans un désert, soleil de plomb, peu de végétation et beaucoup de cactus. Il est une heure quand enfin nous arrivons aux abords de la piscine naturelle. Espérons que l´eau sera fraîche ?
Nous nous engageons dans le labyrinthe que forme cette partie du désert. Quand enfin nous trouvons la piscine, c´est la déception : à peine 40 cm d´eau boueuse, sans aucun doute due à la pluie diluvienne de la nuit... Demi tour pour prendre une boisson pas bien fraîche et repartir pour la labyrinthe de Cusco qui doit être à cette heure sec et donc accessible. Nous sommes fatigués après ces huit heures de marche et nous décidons de tenter le stop, le premier 4x4 s´arrête, étant plein, le chauffeur nous propose de nous accrocher à l´extérieur. Nous faisons à peine quelques mètres que nous stoppons la voiture tant il est difficile de rester accrochés. Finalement le chauffeur nous cale dans le coffre et nous repartons. Nous nous arrêtons à Cusco et après une petite discussion, Jorge le chauffeur nous propose d´aller le lendemain à San Augustin avec eux, site pré-colombien à 5 heures de là. Il insiste tellement pour que nous les accompagnions que nous prenons son numéro et lui proposons de le rappeler ce soir quand nous serons de retour à notre hôtel pour convenir d´un rendez-vous pour le lendemain où ils seront moins nombreux et où il y aura donc de la place dans la voiture. Ils continuent leur route, après que la grand-mère ait largement insisté pour que nous les rejoignons demain à Neiva, une demi heure plus au sud de Aipé. Sur ce nous descendons explorer le labyrinthe rouge de Cusco et nous nous perdons dans le dédale pendant une bonne heure, transpirant sang et eaux tant la chaleur se concentre dans les gorges de ce labyrinthe.Nous regagnons Villavieja en stop et encore une fois un 4X4 plein s´arrête et nous propose de nous accrocher sur les côtés. Cette fois c´est plus confortable et nous acceptons sans hésitation. Arrivés chez nos hôtes nous prenons une douche bien méritée avant de les saluer et de partir pour Aipé. Quand nous abordons l´autre rive, l´eau a inondé une bonne partie des champs et nous regagnons difficilement le village. Heureusement nous trouvons un bar ouvert où une bière bien fraîche n´attendait que nos grands gosiers assoiffés. Nous prévenons Jorge que nous les rejoignons demain matin pour faire la route avec eux. Une bonne pizza dans un bouiboui à roulette installé sur la place et nous allons nous écrouler dans notre chambre.

19 juin 2008

J+217-224 / Incroyables colombiens Episode I

Nous voici avec Rafael, spécialiste du café en Colombie, pays du café 100% Arabica. Nous sommes donc à la meilleure place dans le cadre de notre tour du monde du café. Nous montons à bord du 4x4, le même que celui du père de Laetitia, un autre très bon signe pour ceux qui aiment en voir partout où il est possible d´en voir, je crois que je fais partie de ceux-là, surtout quand les augures sont bonnes !!! Nous sommes contents de nous revoir et Rafael est ravi de nous accueillir dans son pays.
Nous arrivons dans la résidence de Rafael, nous nous présentons au portail, le gardien nous ouvre. On sent que le pays n´est pas sûr. La résidence se compose d´un ensemble de petits immeubles assez modernes. Ana-Lucia -la femme de Rafael- est là et elle aussi est ravie de nous revoir. Le temps de poser nos affaires dans une chambre qu´ils ont préparé pour nous et nous partons dîner dans un centre commercial, pas n´importe lequel : Carrefour. Quand tu pars autour du monde, il faut toujours s´attendre à des expériences nouvelles et inédites. Rafael et Ana-Lucia sont très curieux de notre parcours, nous leur racontons tout en détail. Évidemment la conversation dérive d´elle même vers le café. Rafael est intarissable, nous pouvons lui octroyer le titre de professeur tant sa connaissance est étendue sur le sujet. Il nous parle aussi du programme qu´il nous a préparé. Visite de l´usine dont il est le manager, une trieuse à café ; mais aussi visite d´une ferme qui produit l´un des meilleur café de la région de Tolima, celle du siège local de la "Federacióon Nacional de Cafeteros de Colombia", visite d´un des entrepôts du plus gros exportateur de café de Colombie, d´une entreprise d´engrais naturels spécialisée dans le café... les prochains jours vont être chargés, nous n´aurons pas le temps de nous reposer, mais peu importe. Retour à l´appartement, Rafael nous propose un café, comment refuser ? Il sort sa machine à torréfier, quelques minutes plus tard la douce odeur du café commence à se répandre dans l´appartement. Les grains verts commencent à brunir et à prendre cette belle couleur café. Ensuite il le moud et encore d´autres arômes s´en dégagent. Bonheur et félicité quand il nous sert ce café, le plus frais que nous ayons eu l´occasion de déguster depuis notre visite d´une ferme au pied du Kilimanjaro. Nous nous souhaitons une bonne nuit et allons chacun rejoindre nos chambres. Nous sautons dans un lit deux places au matelas épais, avec des draps ajustés, des oreillers moelleux. Que de bonheur aujourd´hui.
Sept heures Rafael tape à notre porte, il est l´heure de se lever, de prendre une douche, un bon café et de partir visiter son usine à quelques kilomètres de là sur la route de Bogotà. Mais avant de vous parler de cette visite, nous allons causer de celle de la ferme que nous avons fait le lendemain, ce qui facilitera la compréhension du processus. Nous partons de très bonne heure pour une ferme située à deux heures de route d´Ibague, pendant une bonne heure nous suivons la route de Bogotà avant de bifurquer vers les montagnes où pousse le café, en général entre 1000 et 2000 mètres pour l´arabica. Nous commençons à serpenter sur les sublimes routes colombiennes et avant d´arriver à la ferme nous faisons une petite pause pour prendre un petit-déjeuner à la mode colombienne : saucisses, patacones (bananes écrasées et frites). Une dizaine de minutes plus tard nous abordons des chemins boueux et caillouteux que le 4x4 passe sans aucun problème. Nous nous garons et finissons le chemin à pied. Ferme de taille moyenne parmi la multitude de celles qui produisent ce fameux café colombien que vous trouvez régulièrement chez votre épicier préféré. Une femme nous accueille très gentiement et nous commençons la visite. D´abord nous partons sur les coteaux verdoyants où des saisonniers sont en train de récolter à la main de grosses baies rouges sur des branches chargées comme des grappes de raisin. Nous nous dirigeons ensuite vers un bâtiment où sont déchargés les paniers dans une machine qui en ôtera la peau, par la suite les baies passent sur un tapis qui les emmène vers une machine qui va les laver à grandes eaux. La dernière étape, le séchage se fait dans un séchoir qui permet d´assécher les baies très rapidement. Une fois séchées les baie, qui possèdent encore leur coque jaune, sont mise en sac ; les sacs seront acheminés vers des entrepôts de triage comme l´usine de Rafael. Maintenant je peux revenir à la visite du jour, l´usine de Rafael. Je vous épargnerai tous les détails mais je vais tout de même vous décrire l´essentiel du processus. Les camions chargés de sacs de grains arrivent à l´usine, ils sont pesés puis déchargés. Une fois dans l´entrepôt ils sont vidées dans la trieuse, 30 mètres de haut, 20 de large sur une bonne quarantaine de long. C´est à ce moment que les grains sont séparés de leur coque, ensuite ils sont triés pour retirer les mauvais grains. Selon la demande du client, le tri peut être très précis, et pour les clients les plus exigeants, une sélection manuelle peut être faite. En général seuls les meilleurs cafés subissent cette ultime étape, car elle en augmente le prix de façon trés significative. Les grains sont ensuite reconditionnés dans des sacs dont on prélève des échantillons qui sont dégustés par les personnes du laboratoire pour évaluer les différentes propriétés, défauts et qualités des grains et des arômes qui sont notés lors de la catation, procédé similaire à celui du vin. Par la suite les sacs destinés à l´exportation subiront des contrôles des douanes colombiennes et parfois américaines très sévères avant de partir pour les différentes régions du monde. C´est seulement en arrivant dans les pays de destination que les grains seront torréfiés, chaque pays ayant sa méthode, mais aussi pour une raison plus simple c´est qu´une fois torréfié le café perd rapidement de sa saveur et doit être moulu et bu dans les deux mois. L´un des plus grands noms de la torréfaction est la maison Illy à Trieste en Italie, d´ailleurs à notre retour nous avons l´intention d´y faire un petit tour, pour achever notre tour du monde en dégustant le meilleur café du monde.
Dans la journée nous visiterons aussi le siège de la Coopérative locale de café, une institution des plus importantes en Colombie car elle gère environ 50% de la production nationale et aide les cultivateurs par des programmes de scolarisation pour les enfants, aide à la construction des routes dans les zones rurales et caféières, mais intervient aussi dans les programmes de santé... Nous passerons aussi dans une ferme qui produit de l´engrais organique de façon industrielle. Tout cela nous a pris trois grosses journées. Notre connaissance en café est maintenant presque professionnelle !!!
Pour notre avant dernier jour à Ibague, des amis d´Ana-Lucia nous invitent à un concert. Laetitia a vu l`affiche dans la rue et m´avertie que cela risque de ne pas être notre meilleur concert. Nous voilà dans la file d´attente et nous sommes rapidement séparés en deux files, une pour les hommes, l´autre pour les femmes. Celle des femmes est infiniment plus longue que celle des hommes, si j´étais misogyne je dirais que c´est mauvais signe ! Nous entrons dans le chapiteau côté VIP, bizarrement ce sont les places les plus au fond. Tables et chaises ambiance cabaret sous tente. Le tout sur fond de musique Salsa, jusque là tout se passe bien. Nous sommes tous les six attablés à déguster des petits verres en attendant que le concert commence. Nous avons le temps de finir une première bouteille et d´entamer largement la seconde. Nous sommes entré dans la salle vers 20 heures, il est maintenant plus de 22 heures. Ça doit être une sacrée star pour se permettre autant de retard. la salle s´impatiente doucement quand enfin vers 23 heures les lumières s´éteignent ; tonnerre d´applaudissements, plein feu sur la scène et c´est à ce moment là que ça tourne mal pour nous. Un quinquagénaire chilien aux allures de Julio Iglesias commence son répertoire ennuyeux à la plus grande joie du public qui reprend en choeur chacune des paroles d`amour de leur idole. Notre torture durera pas moins de deux heures, d´ailleurs nous ne sommes pas les seuls, Rafael n´a pas l´air très emballé non plus. Nous nous disons qu´il est là parce qu´Ana-Lucia nous a invité et qu´il aurait été de mauvais goût qu´il reste chez lui... A la fin du concert vient le moment temps redouté du "alors qu´avez vous pensé du concert ?". Très diplomatiquement Laetita répondra que ce n´est pas sa tasse de café ! Comme on dit, tout cela partait d´un bon sentiment...
Le lendemain c´est dimanche mais ce n´est pas pour autant que Rafael se repose. Il passe la journée à déguster des cafés pour les noter. Le soir nous préparons un repas pour remercier Rafael, Ana-Lucia et ses amis pour leur invitation. Ils nous offrirons des cadeaux couleur café, et nous passerons une bien meilleure soirée que la veille à discuter café, politique et du futur mariage des amis d´Ana-Lucia qui aura lieu la semaine prochaine. Le lendemain Rafael doit partir pour les États-Unis pour une foire internationale de café, quant à nous nous prendrons la route du sud, direction le Désert del Tatacoa.

8 juin 2008

J+213-217 / En route pour un bon café

Finie la moiteur amazonienne. Nous sommes confortablement installés dans un bus climatisé direction Ciudad Bolivar au Vénézuela, 2000 kilomètres plus au nord. Changement de bus prévu à l´aube à Boa Vista, dernière grosse ville brésilienne avant la frontière vénézuélienne. Suite à quelques problèmes mécaniques, nous loupons la correspondance. Nous sommes maintenant coincés à Boa Vista pour 24 heures de plus. Il fait chaud, un paysage plat, une gare déserte, dans ce décor de rêve nous trouvons un hôtel miteux à deux pas de la gare ; une douche pour nous laver de la sueur du voyage et nous partons à la recherche du centre ville. Nous longeons une immense avenue, peu de voitures et aucun bus. Sous cette chaleur le bout de la route parait très loin. Nous hélons un taxi collectif, à peine plus cher qu´un bus. Quelques minutes plus tard nous descendons du taxi, nous voici dans le centre. Ordinaire et désert, dimanche, 13 h 30 dans une ville de province amazonienne. On zone dans cette cité à l´horizon dégagé et à la chaleur étouffante. Un snack par ci, une glace par là, un supermarché climatisé, des places immenses reliées par des avenues gigantesques, sans voiture pour les arpenter. Quelle étrange cité. Il n´y a donc pas grand chose à faire dans cette ville de plus de 400 000 habitants. Même le cinéma principal qui affiche 4 films n´ouvre pas avant le soir et nous ne voyons pas un seul internet ouvert. Nous avons compris, nous retournons dans notre hôtel minable pour une bonne sieste à l´ombre de notre ventilateur, presque vingt minutes avant de pouvoir trouver un taxi. Nous passons la soirée sur le parking de la gare dans une gargote pour nous restaurer. Quelle journée formidable, rideau et à demain.
7h00, nous sommes seulement trois avec un autre touriste anglais dans un immense bus en direction de la frontière vénézuelienne. Une fois arrivés nous réalisons un change des plus avantageux, environ 25% au dessus du taux officiel, signe d´une économie qui va mal. Quelques kilomètres plus loin, l´anglais nous abandonne pour
parcourir la région où se trouve les Tepui, ensemble de plateaux où l´on peut découvrir des écosystèmes uniques et différents du reste de la région. Petit à petit le bus se remplit au fur et à mesure des arrêts. Bien après la tombée de la nuit, nous arrivons à Ciudad Bolivar. Une dame nous parle d´un hôtel rudimentaire pas loin du terminal, nous préférons cela que de traverser une ville inconnue en pleine nuit. Effectivement l´hôtel se trouve à deux pas. Pas de sonnette, alors je donne de la voix, un éclopé taciturne descend nous ouvrir ; il nous montre une chambre et s´en retourne sans avoir décroché un mot. C´est rudimentaire mais vu l´heure ça fait l´affaire.
Le lendemain, je pars explorer le quartier pendant que Laetitia continue d´arpenter le pays des songes. Un nombre incroyable de vielles caisses américaines hantent les rues de la ville, toutes plus belles et déglinguées les unes que les autres. Marcher sur ces trottoirs nécessite une attention de tous les instants pour ne pas trébucher (dalles décalées, trous béants...), surtout si on veut regarder les murs ornés de graffitis politiques, dont une bonne partie à l´image d´Hugo Chavez. Des poteaux électriques s´élancent et des centaines de fils s´y accrochent pour se croiser dans le ciel comme des toiles d´araignée sans cohésion. Après une heure d´errance à transpirer sous le soleil de Chavez, je rejoins Laetitia pour assister au réveil de la princesse et c´est pas toujours facile ! Nous expédions le petit déjeuner et nous partons explorer la ville, côté historique. Nous sommes en fin de matinée, la population a déjà abandonné les rues brûlantes de ville pour les laisser aux quelques touristes, seules personnes capables de braver les ardeurs du soleil de midi pour admirer quelques bâtisses coloniales laissées par la toute puissante couronne d´Espagne. Nous passerons évidemment par la place Simon Bolivar avant que nos errances et un dernier brin de lucidité ne nous emmènent à l´ombre des arbres du jardin botanique. La chaleur retombe enfin, nous regagnons notre hôtel, sur le chemin nous passons par un cimetière, nous y verrons quelques tombes aux noms bien corses. D´ailleurs ce ne sont pas les seules traces que la diaspora corse a laissé au pays, nous trouvons aussi sur les stands de souvenirs des portes-bonheurs qui ressemblent étrangement à ceux de l´île de beauté : un poing fermé avec le pouce sortant entre l´index et le majeur, mais apparemment les vénézuéliens qui les vendent parmi d´autres biblos en ignorent l´origine. Tout s´explique lorsque l´on sait que beaucoup de corses se sont installés au Venezuela et que deux anciens présidents du pays étaient corses.
A la nuit tombée nous sommes à la gare routière et attendons patiemment notre bus pour la frontière colombienne. Une nuit, un jour de route plus à l`ouest et nous arrivons à San Cristobal côté Vénézuela. Nous passons la soirée aux alentours de la gare, immeubles sans charme, rue bruyante et polluée. Nous mangeons un bout dans une salle déserte avec pour seuls voisins quelques policiers en train de siroter des sodas, le tout sur fond de musique salsa –la Colombie n´est plus très loin-, éclairés par des néons nous inondant d`une lumière blafarde. Le lendemain, nous grimpons dans un tortillard pour la ville frontière, une heu
re de route plus loin. Nous payons un étonnant droit de sortie de territoire mais qui semble tout à fait officiel et reprenons un bus jusqu´à la frontière, il est surchargé de monde, sans climatisation, dix minutes à transpirer et à humer la sueur de tout ce joli monde. Nous faisons la queue à la douane pour faire tamponner notre passeport, nous découvrons sur les murs les têtes des personnes les plus recherchées de Colombie dont Manuel Marulanda, décédé depuis. Nous passons la frontière à pied, nous voilà à Cucuta. Sur les trottoirs s´empilent des centaines de bidons d´essence et attendent le client à l`affût d`un gasoil vénézuélien, sans aucun doute de contrebande et bien meilleur marché qu´à la pompe de TEXACO...nous sautons dans le premier bus direction la gare routière, nous avons encore beaucoup de route à parcourir. Nous avons rendez-vous demain matin à Ibague avec Rafael, l´ami colombien que nous avions rencontré au Pérou, lors de notre randonnée au Matchu-Pitchu. Nous errons de guichet en guichet avant de trouver le bon prix et le bon horaire. Nous choisissons un bus qui part en fin d après-midi et qui arrive dans la matinée. Nous prévenons Rafael et nous partons traîner nos guêtres en ville, rien d´extraordinaire mais animée. De retour à la gare, nous assistons à la fouille complète de notre bus par les douanes, pas besoin d´expliquer ce qu´ils cherchent, la Colombie produit 80% de la cocaïne consommée à l´échelle mondiale. Il est 17 heures le bus démarre, pendant une bonne heure nous pouvons profiter du paysage avant que le soleil ne se couche derrière les montagnes. Petit à petit la faim commence à se faire sentir, mais apparemment le chauffeur est un ascète et n´est pas disposé à faire de pause, nous nous endormons le ventre presque vide, les quelques chips que nous avions ne ne nourrissent pas vraiment. Le soleil se lève, il se passe encore deux bonnes heures quand enfin nous nous arrêtions pour prendre un petit déjeuner dans une sorte de restaurant géant de bord de route, mais adapté à la communauté rurale qui doit être légion dans la région. Un immense parc à bestiaux jouxte le restaurant, drôle d´ambiance de prendre ces corn-flakes parmi des meuglement de vaches et un doux fumet de bouse. Le ventre plein nous repartons, pas pour très longtemps. Nous tombons en panne, nous attendons une demi-heure pour changer de bus. Une nouvelle demi-heure et de nouveau nous nous immobilisons. Devant nous, une longue file de véhicules sont à l´arrêt, des gens sont assis sur le bord de la route et patientent. Nous partons nous renseigner et apprenons qu´une course de vélo est organisée dans la région, nous devrons patienter deux ou trois heures avant de pouvoir repartir. Il fait chaud, très chaud ; on mangerait bien une glace et comme par miracle un tricycle passe et propose toutes sortes de rafraîchissements.
Nous arrivons à Ibague avec à peine 5 heures de retard, nous appelons Rafael, nous nous installons dans un petit kiosque à l´extérieur de la gare et commandons deux expressos avec du café fraîchement moulu.
Rafael arrive :
- ” Holà amigos, ¿Les gusta nuestro café de Colombia?
- Si, mucho, el mejor desde el Kilimanjaro.”