30 avril 2008

J+180-185 / Etape contre la montre

Dans six jours nous avons un avion qui décolle de Tarapoto pour Iquitos. Plus de 1000 kilomètres, une distance qui en France est parcourue en 4 heures par le train, ici, il n´y a pas de train à grande vitesse ni d´autoroute et on trouve parfois des routes goudronnées. Donc pas de temps à perdre, surtout que nous prévoyons un arrêt à mi-chemin à la Merced, capitale du café péruvien.
Il est 18 heures quand notre bus démarre et sort de la gare de Cusco, il n´est pas de première jeunesse, mais beaucoup plus confortable qu´un bus éthiopien. Ayant pris nos places au dernier moment, nous sommes à l´arrière du bus. Nous avons un changement prévu vers 6 heures du matin pour continuer notre route vers Andahuaylas. Le bitume étant bon et le bus plongé dans l´obscurité nous nous endormons rapidement. Comme prévu nous arrivons à Andahuaylas pour le changement de véhicule, il est plus petit et en moins bon état. Arrivant aux places qui nous sont assignées, nous ne les trouvons pas, les sièges ont été retirés ! Après discussion, nous parvenons à nous asseoir sur deux des cinq places qui trônent à l´arrière du bus. Etant donné l´aperçu de la piste et notre expérience éthiopienne nous ne sommes guère enchantés. Il faudra à peine une demi heure pour q
ue nos craintes ne se transforment en réalités. La piste est caillouteuse, pleine de bosses et de trous. Ce ne sera donc pas un voyage d´agrément, d´autant que les pauses sont inexistantes et nous devront attendre midi avant que le bus ne s´arrête dans une station service à l´abandon, transformée en aire de pique-nique. 20 minutes plus tard nous repartons, pause obligatoire, un camion bloquant la voie, le chauffeur préfère nous invite à descendre afin de manoeuvrer la conscience tranquille et passer sereinement entre le camion et le ravin (à vrai dire nous aussi on préfère le regarder faire sa manœuvre de dehors). Sans autre dommage qu´une crevaison et notre postérieur endolori nous arrivons dans la ville de Ayacucho. Nous venons de parcourir à peine 150 Km en 24 heures. Pas de temps pour passer la nuit dans cette charmante bourgade qui vit naître le sentier lumineux il y a une vingtaine d´années, nous nous renseignons immédiatement et trouvons un bus qui part dans une heure. Nous dînons à l´étage de la compagnie de bus, lumière crue, menu classique et pas cher : une soupe, une assiette avec viande, riz, patates et une boisson. La note réglée nous prenons place dans le bus pour continuer notre course, en espérant que la route sera en meilleur état. Il 21 heures, nous sortons de la ville. Une heure plus tard notre bus s´immobilise, les lumières du bus s´allument, un jeune homme habillé de façon militaire se dirige directement vers le fond, et demande les cartes d´identité...nous nous regardons avec Laetitia, pendant une fraction de seconde nous avons un doute, est-ce vraiment la police ? Oui, après avoir photographié nos passeports, il nous les rend et part contrôler d´autres passagers, et nous repartons dans la nuit direction le nord du Pérou. Au rythme des bosses nous finissons par nous endormir.
Quatre heures du matin, nous sommes à nouveau réveillés. Le bus vient de s´immobiliser apparemment sans raison. En sortant nous voyons que nous ne sommes pas le seul véhicule à l´arrêt. Une longue file s´étend devant nous, à la lumière de notre torche nous la remontons pour
nous rendre à la source du problème. Un camion immobilisé en travers de la route, une partie de la remorque prête à basculer sur les maisons en contrebas. Nous retournons dans le bus et nous rendormons, de toute façon il n´y a rien d´autre à faire. A l´aube le bus n´est toujours pas reparti, un autre camion est là. Des personnes ont commencé à décharger les sacs de ciment, arrive ensuite une grue pour débloquer la situation devant une bonne soixantaine de spectateurs (les occupants de tous les véhicules immobilisés). 9 heures, nous repartons à l´assaut des pistes péruviennes. Vers midi nous sommes à Huancayo. Nous restons deux heures dans cette petite ville, le temps de se restaurer d´acheter un billet pour notre prochaine étape et nous partons pour Huánuco. Aucun problème sur la route, nous arrivons à l´heure prévue, incroyable. Pas de départ prévue pour cette nuit, ni pour le lendemain, demain on se repose. Un passant nous indique un petit hôtel sympathique en ville. Minibar, télévision, douche chaude, lit confortable. Parfait pour se reposer de ces deux jours de route éprouvants. On prend de la bière dans le frigo et allumons la télé, une chaîne porno... nous optons pour la chaîne enfantine et nous nous endormons en regardant la Panthère Rose. Nous profitons de ce jour de repos pour visiter la ville et réfléchir si nous avons le temps de nous rendre à la Merced, grosse cité caféière de la région. Après nous être renseignés, cela s´avère impossible, car nous allons devoir, à partir d´ici prendre des taxis collectifs avec plusieurs villes étapes, les routes sont tellement pourries que les bus ne peuvent les emprunter. Cela devrait nous prendre une journée et demie si tout se passe bien, et notre avion est dans trois jours. Nous disons adieu à La Merced et réservons un taxi pour le lendemain 10 heures.Dans la matinée nous avons rencontré un torréfacteur, chez qui nous avons dégusté un bon café de la région et sûrement le meilleur du Pérou en ce qui nous concerne. Le soir alors que nous regardons passer une procession, semaine sainte oblige, nous retrouvons la personne qui nous avait indiqué l´hôtel, nous allons boire un coup dans un bar fort sympathique et il nous fait découvrir l´aguardiente, un alcool péruvien à base de canne à sucre. Nous passons le reste de la soirée en amoureux pour fêter nos six mois de voyage, dans le restaurant le plus chic de la ville, avec sans doute le menu le plus cher, mais aussi le plus cheap. Déprimés, mais souriants nous allons nous coucher après cette belle arnaque gastronomique, mais nous vous l´avions déjà raconté.
Le lendemain 10 heures, le taxi est là. Nous embarquons, repassons par la station pour charger du monde. Trois heures plus tard sur une route relativement clémente nous arrivons dans la ville de Tingo Maria. On mange un bout dans une gargote à la mode péruvienne et nous rembarquons dans un autre taxi, cinq heures de piste au programme. Sans encombre mais avec une bonne heure et demie de retard nous arrivons à la nuit tombée sous une légère pluie à notre étape suivante, Tocache. Une ville digne du farwest, une route vaguement goudronnée, mais la majeure partie des voies sont boueuses. Une jeune fille qui était dans le taxi avec nous et qui est du village nous indique un petit hôtel avec un confort minimum qui conviendra parfaitement pour passer la nuit. Nous trouvons un taxi pour Tarapoto, départ le lendemain 7 heures, les dix dernières heures de piste avant de pouvoir enfin prendre l´avion. Nous avons hâte, en 4 jours, nous cumulons déjà 60 heures de route. Avant même que nous soyons réveillé, nous entendons frapper à la porte. C´est le chauffeur qui vient nous chercher avec une bonne demi heure d´avance. Je lui fais comprendre avec mes trois mots d´espagnol de repasser dans un petit quart d´heure. Nous passons nos frusques vite fait, un débarbouillage et nous sommes dans la rue. Le temps de fumer une clope, faute d´un bon café pour nous réveiller et voilà que notre voiture s´avance. Comme pour le jour précédent nous prenons la direction du garage pour charger les trois passagers manquants ; cela nous laisse le temps de voir la ville se réveiller et nous aussi en sirotant un café dans le bar voisin. 8 h 15, c´est le coup d´envoi de la dernière spéciale pour Tarapoto. D´une spéciale, nous passons à un contre la montre. Notre chauffeur doit être un pilote de rallye frustré... nous avoisinons les 80km/h sur une piste dans un état plus que limite. Après une heure trente de course, enfin nous nous arrêtons dans u
ne gargote pour prendre le petit-déjeuner. Un quart d´heure plus tard nous sommes à nouveau sur la piste à nous enchaîner bosses et virages. Quelques passages boueux, quelques ornières. Juste à la sortie d´un virage un glissement de terrain plus important que les autres bouche la moitié de la route, le chauffeur ralentit, après une seconde de réflexion il remet la gomme, nous n´avons même pas le temps de parcourir les dix premiers mètres que nous sommes immobilisés par la boue. Il ne nous reste plus qu´à enlever nos chaussures pour descendre de voiture. Laetitia aide une dame en portant sa petite fille pour traverser ce passage boueux et je donne un coup de main pour dégager la voiture. Il nous faudra d´abord dévier l´eau qui coule et qui continue à ramener de la boue sur la route. Après une bonne demi-heure de patinage, 5 personnes à tracter la voiture et se faire copieusement arroser de boue, le chauffeur réussit à sortir de ce bourbier péruvien. La voiture à vide, il prend du recul, accélère à bloc et passe les 25 mètres de boue sans difficulté. Sans attendre nous repartons, le chauffeur continu d´attaquer la piste. Rapidement il est contraint de ralentir pour un simple problème mécanique, la surchauffe du moteur...ce qui l´oblige à conduire en roue libre quand la route le permet. Nous finissons par nous arrêter près d´une rivière où pendant une dizaine de minutes nous faisons des allers-retours entre le cours d´eau et le radiateur de la voiture. Une fois la voiture remise de ses chaleurs nous repartons. Une dernière heure de route avant la pause midi, le chauffeur en profite pour se plonger dans le moteur pendant que les passagers se posent pour manger. J´en profite pour peaufiner mon rôle de « El Gringo » et d´acheter du café à un revendeur local, pendant ce temps Laetitia discute avec trois vieux assis à regarder ce qui passe dans la rue, c´est à dire pas grand chose. Ils lui annoncent que ça bloque un peu plus loin. Effectivement à peine une heure après être reparti, nous dépassons une file de camions, bus, voitures immobilisées ; nous stoppons à notre tour et allons voir l´origine du problème. C´est simple, la moitié du pont s´est écroulée. Des ouvriers travaillent depuis ce matin à le remettre en état, mais cela donne l´impression que rien n´a été fait. Notre avion est demain et il n´y a qu´une seule route, donc pas le temps d´attendre, nous payons notre taxi pour ce bout de course et trouvons de l´autre côté du pont un chauffeur de fortune plein d´opportunisme qui charge sa vieille caisse de galériens comme nous. Nous prenons les deux dernières places disponibles à côté du chauffeur. Une heure plus tard nous somme dans un petit village et changeons de voiture. Enfin la route s´améliore, moins de bosses, moins de montagne, mais cela n´empêchera pas la fatalité de nous rattraper. Nous finissons par crever, mais que légèrement autant que cela soit possible. Nous avons le temps d´arriver jusqu´à un atelier de vulcanisation. Petit à petit la piste laisse place au macadam, nous arrivons à un rond point, le chauffeur le coupe comme si de rien était. Nous roulons encore vingt minutes sur cette route à double sens et possédant une ligne blanche. Enfin Tarapoto, 5 jours de voyage, 70 heures de piste. Nous prenons le temps pour un bon restaurant, une grâce matinée et en fin d´après-midi nous embarquons et prenons notre envol au dessus de l´Amazonie pour la plus grosse ville du monde sans liaison routière, Iquitos.

J+176-179 / 5000 marches pour la cité des nuages

Quand on évoque Cusco on pense bien sûr au Machu Pichu et il était inenvisageable que nous n´y allions pas. Nous n´avons pas eu les moyens de nous offrir le fameux Inca Trail qui relie le Machu Pichu à pied en 4 jours en passant par d´anciens chemins incas en franchissant des cols à 4000 m d´altitude mais nous avons trouvé un autre trek de 4 jours et 3 nuits à un tarif raisonnable (tout est compris, les déplacements, l´hébergement, les repas et surtout l´entrée du Machu Pichu qui n´est pas donnée) et dont le parcours nous intéresse . Après avoir consulté plusieurs agences - toutes ne sont pas sérieuses- nous concluons avec l´une d´elle, départ prévu le lendemain 7 h. Au programme, 60 Km à vélo - heureusement c´est de la descente -, deux jours de marche et enfin une journée au Machu Pichu. Après avoir attendu plus d´une heure que l´on vienne nous chercher nous faisons connaissance avec le groupe de neuf personnes, plusieurs nationalités : deux colombiens, un américain, une hollandaise, une suédoise et quatre français plus le guide qui s´appelle Washington. Après quatre ou cinq heures de route pendant lesquels nous faisons connaissance, nous voici en haut d´un col, après un rapide déjeuner en bord de route, nous enfourchons nos vélos. Maintenant, ce col il va falloir le descendre pour rejoindre la petite ville de Santa Maria. A peine nous commençons à rouler qu´il se met à pleuvoir, et pas qu´un peu, nous avons tout de même réussi à protéger le haut avec nos coupe-vent mais pour le reste nous sommes imbibés ! La descente ne présente pas de difficultés mais l´état des vélos est plus que limite. Le vélo du guide n´a pas de freins, le colombien père une des pédales, une chaîne casse et nous mettons beaucoup plus de temps que prévu parce qu´il faut nous arrêter souvent pour réparer. Nous mettons au moins six heures pour rejoindre le village bien contents de trouver une douche chaude. Le lendemain, après une bonne nuit, nous partons pour une longue journée de marche. Toutes nos affaires n´ont pas eu le temps de sécher pendant la nuit, surtout les chaussures et les chaussettes mais cette fois-ci la pluie s´arrête quand nous partons. Nous empruntons d´anciens chemins incas dont certains étroits et à flan de montagne et nous passons par des endroits magnifiques. La région est superbe et en plus il y a du café ! De petites plantations bordent les chemins et plus nous montons plus il y en a. Mais nous ne sommes pas les seuls que le café intéresse, nous apprenons que Rafael, le colombien, est directeur d´une société de tri de café notamment pour l´exportation ! Il nous parle longuement du café colombien pendant que nous marchons, du coup on a plein d´infos avant même d´y être, en Colombie ! Nous arrivons dans une petite ferme où nous nous arrêtons pour une pause bien méritée. La gérante, la señora Justinia produit du café et nous fait goûter son dernier cru. Il est bon et surtout meilleur que le café instantané que nous bu ce matin et la plupart du temps depuis que nous sommes sur ce continent. Nous lui achetons quelques grains verts c´est à dire non torréfiés pour les ramener et compléter notre collection des cafés du monde. Elle nous explique comment elle travaille et aura avec Rafael une longue discussion, la rencontre de deux univers, le gros exportateur colombien et le petit producteur péruvien. Nous sommes maintenant prêts à repartir, le chemin est encore long jusqu´à Santa Teresa notre prochaine étape. Nous marchons encore une bonne partie de la journée mais les chemins ne montent pas trop, nous suivons la cadence et plutôt bien même. Après plusieurs semaines à plus de 3500 mètres d´altitude sur l`Altiplano bolivien et péruvien, maintenant que nous sommes à moins de 2500 métres, nous marchons tranquille, comme sur du plat même en côte ! A cette altitude la température est bien plus élevée, il fait même chaud et après le froid de l´Altiplano ça fait du bien. Notre périple de la journée se terminera par une baignade dans une source d´eau chaude, un petit complexe au milieu de nul part avec des bassins de recueillements pour les eaux chaudes qui sortent des flancs de la montagne. Nous restons une bonne heure à mijoter dans ces eaux avant de rejoindre l´hôtel en bus. Après cette journée on est tous un peu fatigués mais on décide quand même d´aller boire un verre. C´est vrai quoi on n´est pas des vieux et on ne va quand même pas aller se coucher à 21 h. C´est ce que certains font mais un petit groupe se retrouve dans le seul bar un peu animé de la ville à boire des pisco sour. C´est un cocktail péruvien, un alcool de raisin, de jus de citron, de sucre de canne et de blancs d´oeufs montés en neige. Après que chacun ait payé sa tournée nous décidons d´aller tester la piste de « dance » de la discothèque locale. Nous arrivons dans un endroit à la décoration assez étrange. Un des murs est recouvert de boites d´oeufs et un autre d´une peau de bête difficile à identifier. Nous boirons quelques bières en dansant sur les rythmes péruviens à la mode. Etant les derniers clients, nous sentons que la propriétaire et le DJ ont des projets plus intéressants pour le reste de la nuit, comme eux nous partons nous coucher. Le lendemain nous nous retrouvons dans le même restaurant que la veille pour y prendre notre petit-déjeuner. Réveillés et l´estomac plein nous partons pour notre dernier jour de marche, direction la cité perdue. Le village de Santa Maria est situé en hauteur, depuis que l´ancien ait été submergé par les eaux en crue du fleuve il y a quelques années ; nous en voyons les ruines en rejoignant la rivière pour traverser le fleuve. Traversée peu ordinaire, assis dans un caisse suspendue à un filin 8 mètres au-dessus du fleuve démonté en cette saison par les eaux affluant de tous les versants des montagnes avoisinantes. La ballade est moins intéressante parce que nous longeons le fleuve sur un chemin de terre mais les paysages n´en restent pas moins magnifiques. A la mi-journée nous atteignons l´entrée du Parc National du Machu Pichu mais le site lui-même est encore loin. Nous nous arrêtons pour déjeuner et attaquons ensuite la dernière partie qui sera aussi la moins plaisante. Il n´y a pas de chemin et nous avons du longer la voie ferrée ou plutôt marcher entre les rails pendant trois ou quatre heures. Du coup, pas facile de regarder les paysages, nous devont garder l´oeil oú nous posons les pieds pour ne pas se gauffrer sur les cailloux. Pas facile mais en fin de journée nous arrivons enfin à Aguas Calientes, la ville la plus proche du Machu Pichu. C´est là que nous passerons la nuit et que nous partirons demain matin à l´aube pour découvrir enfin le site. Nous passons une dernière soirée ensemble, nous sommes tous un peu crevés mais contents de ces trois jours et nous avons tous hâte de voir à quoi ressemble le site ; Washington (le guide) nous explique le programme du lendemain. Pour commencer, il va falloir monter jusqu´au Machu Pichu, deux solutions, un bus par une route en lacet qui gravit la montagne où à pied par les 1700 marches des escaliers qui coupent chaque virage. Dans tous les cas ce sera à l´aube pour arriver parmi les premiers. Nous ne sommes que quatre à décider de monter à pied, Rafael, Ana Lucia et nous deux. Au moins on pourra dire qu´on aura atteint le Machu Pichu sans aide extérieure ! Le guide lui ne nous accompagnera pas et nous confie à un collègue qui nous fera la visite du site pendant deux heures demain. Les quatre courageux ont rendez-vous à 4h30, c´est qu´il faut un peu de temps pour les gravir ces 1700 marches, pour les autres vu qu´il ne faut que 15 minutes pour monter en bus ils pourront dormir un peu plus. Nous devons tous nous retrouver là-haut avec le guide vers 6h.
Le début de l´ascension se fait à la lampe, petit à petit le jour se lève et nous découvrons le paysage. Rien d´étonnant à ce que l´on appelle les gens de la région « le peuple des nuages ». Les montagnes sont nimbées de brume et cela rend l´atmosphère encore plus mystérieuse. Le Machu Pichu qui est resté caché et ignoré pendant toutes ces années ne se dévoilera qu´au dernier moment. A chaque volée de marche nous nous attendons à le voir mais non, il nous faut encore faire un effort. Au bout d´une heure et demi, enfin les premières maisons qui bordent le site apparaissent. Ca y est, nous y sommes enfin. A cette heure-ci, il n´y a pas encore beaucoup de monde et nous aurons la chance d´être parmi les premiers à entrer. C´est impressionnant, la lumière à cette heure est féerique et avec le site presque vide de touristes on se sentirait presque revenu 500 ans en arrière. Le guide passe deux heures à nous expliquer l´histoire de ce lieu magique. Construite autour de deux pics, le Machu Pichu (Vieux Pic) à 3 140 mètres et le Waynapicchu (Jeune Pic) à 2 700 m, la cité est perchée à 2400 mètres d´altitude et aurait été construite au XVème siècle par l'empereur Pachuatec. Abandonnée un siècle plus tard à l'arrivée des conquistadors espagnols, elle fut redécouverte seulement en 1911 par Hiram Bingham, un historien américain qui y trouve plus de 260 constructions très élaborées et partiellement recouvertes par la jungle. Il y aurait encore beaucoup de choses à raconter, aussi pour ceux que ça intéresse, http://fr.wikipedia.org/wiki/Machu_Picchu vous donnera plus de détails. Après ces deux heures de premier contact avec le site nous avons quartier libre jusqu´à 16 heures pour l´explorer. Nous sommes quelques uns à décider de gravir le Waynapicchu (le site est limité à 400 visiteurs par jour) qui nous permettra d´avoir une vue plongeante sur le Machu Pichu, et encore pas loin de 1000 marches à gravir… Mais ça valait le coup, d´ici la vue est impressionnante et unique. Nous y resterons un long moment à la contempler, d´ici le site ressemble à une maquette. 1000 autres marches pour redescendre et nous pouvons maintenant nous ballader entre et dans les maisons, sur les terrasses qui servaient aux cultures, près des temples et explorer les moindres recoins. Il y a maintenant beaucoup plus de monde et le lieu a un peu perdu de sa magie. Il est maintenant temps de redescendre à Aguas Calientes et nous serons les seuls à le faire par les escaliers. Il pleut à verse et le bus aurait sûrement été la meilleure option mais d´une part son prix est plutôt élevé et nous nous disons que puisque nous sommes montés à pied ce serait idiot de descendre en bus. Encore 1700 marches qui nous font donc 5000 pour la journée, pas mal, même pour des gens comme nous qui ont l´habitude de monter et descendre 7 étages à pied tous les jours, qui ne font que 120 marches ! Nous arrivons trempés mais contents de la journée même si nous ne pouvons nous empêcher de penser que la société qui gère le Machu Pichu pratique du vol organisé et légalisé. Je parle d´une société parce que c´est une entreprise pétrolière qui détient en majorité le site et l´exploite, ce n´est pas l´état qui en est le gestionnaire. Visiter le Machu Pichu coûte cher si on prend l´itinéraire classique. Pour l´aller-retour en train depuis Cusco il faut conter 60 euros, le bus pour monter au site c´est 4 euros (ça parait peu au Pérou c´est le prix pour un dîner pour deux), ensuite il faut débourser 30 euros pour entrer sur le site, et je ne parle même pas du prix de la nourriture ou des boissons sur place (une bouteille d´eau coûte 10 fois le prix normal !), soit au moins 100 euros par personne. De plus l´affluence des touristes toujours plus nombreux pose un gros problème écologique quant à la stabilité du sol, un glissement de terrain met le site en danger. Pourtant un projet est en préparation, qui prévoit la construction d'un énorme complexe touristique de six étages comprenant, entre autres, un terminal pour le téléphérique, des boutiques de souvenirs, des restaurants et un hôtel. On prévoit aussi l'ouverture de boîtes de nuit et d'un casino ! Pour cela la compagnie pétrolière doit racheter les terrains qui sont encore, mais pour combien de temps, la propriété de quelques péruviens qui ne veulent pas vendre et subissent la pression de cette société. De nombreuses manifestations et grèves ont lieu à Cusco contre la privatisation totale du site. Ca y est, notre treck au Machu Pichu se termine et nous rentrons à Cusco après 4 jours à en prendre plein la vue. Le retour est prévu moitié en train et moitié en bus (beaucoup moins cher) mais nous ne verrons pas grand-chose des paysages d´une part parce qu´il commence à faire nuit mais surtour parce que nous nous sommes endormis à peine installés dans le train ! Avant de nous dire au revoir, Rafael et Ana Lucia nous invitent à passer les voir à Ibagué, en plein coeur de la Colombie dans une des régions caféière du pays. La Colombie fait partie de nos destinations et nous acceptons volontiers l´invitation et nous nous donnons rendez-vous dans moins d´un mois.

17 avril 2008

J+172-175 / Cusco, le ``nombril du monde´´

Cusco et la Vallée Sacrée, depuis le temps que nous en parlons et en entendons parler, enfin nous y sommes. A 3300 m d´altitude, Cusco -qui signifie nombril du monde en quechua- a été fondée au XIème siècle et était la capitale et ville sainte de l´empire Inca jusqu´à ce que les espagnols l´envahissent vers 1533, la pillent, en détruisent une bonne partie et construisent Lima pour en faire la capitale. L´empire s'étendait alors de l'actuelle Colombie jusqu'à l'Argentine, le Chili, l´Equateur, le Pérou et la Bolivie. Nous nous attendions à une belle ville mais nous avons quand même été surpris par les édifices magnifiques qui nous font face que ce soient ceux qui datent des incas ou ceux érigés par les conquistadors. Nous passons deux jours à nous ballader dans la ville pour découvrir cette surprenante architecture. On peut encore admirer les murs incas dans certaines rues de la ville, sans mortier et avec un ajustement parfait. Impressionnant, surtout quand on sait que le Pérou est une zone extrêmement sismique et qu´en 600 ans il y a eu pas mal de tremblements de terre. D´ailleurs certains bâtiments datant des conquistadors sont construits sur les fondations de ces murs et les les tracés des rues incas ont été conservées.
Dans les environs de la ville d´autres ruines incas intéressantes sont à voir, notamment Moray et les Salinas de Moras qui se trouvent dans le même coin. Moray est un ancien centre de recherches agricoles inca où étaient pratiquées des expériences de culture. Le site se présente comme un amphithéâtre constitué de plusieurs terrasses disposées en cercle concentriques sur dix niveaux avec un système d´irrigation. La position des terrasses créent toute une série de microclimats : la température est plus élevée au centre et diminue en fonction de la distance de chaque terrasse. Cela permettait aux incas de simuler une vingtaine de microclimats différents. Moray aurait notamment servi à prévoir les rendements agricoles, non seulement dans la Vallée sacrée mais aussi dans d'autres partie de l'Empire inca et permettaient de cultiver plus de 250 espèces de plantes. Un seul des trois amphithéâtre a été restauré et c´est très impressionnant de se promener dans ce lieu, vieux de 600 ans et de constater l´ingéniosité de ce peuple. Les Salines de Moras datent de la même époque et sont constituées de bassins en terrasses permettant chaque année la récolte d'une dizaine de tonnes de sel. Les bassins sont alimentés par de petites canalisations reliées à une source d'eau salée. La technique pour le récolter est la même depuis les incas et quasiement chaque bassin a un propriétaire différent et ils se transmettent de génération en génération depuis des centaines d´années. Un endroit étonnant. C´est aussi à Cusco que nous avons retrouvé Fred le caviste, rencontré à Paris lors d´une dégustation de vin et qui est parti pour un tour du monde de trois ans deux jours après nous. Nous avons passé deux jours ensemble et ça nous a fait plaisir de partager nos anectodes et expériences de voyageurs. Nous avons aussi rencontré Florian et Lorène et c´est entre français que nous avons passé les deux derniers jours à Cusco.

9 avril 2008

J+163-171/ Un rendez-vous au sommet

Destination Isla de Sol sur le lac Titicaca, 4 000 mètres au dessus de la mer. En quatre heures de bus nous arrivons à Copacabana, nous embarquons ensuite à bord d´un bateau qui nous dépose dans un petit port dans la partie sud. L´île est beaucoup plus montagneuse que ce que nous pensions. Nous suons comme des mulets pour arriver jusqu´au village 200 mètres plus haut. Croyez-moi c´est pas facile avec nos sacs de 15 kilos et l´oxygène raréfié. Heureusement au sommet nous trouvons un hôtel avec une terasse au soleil avec une vue panoramique. Nous nous reposons de notre effort autour d´un bon café. Le lendemain nous avons un rendez-vous supposé avec Ivan et sa copine qui devrait normalement arriver en milieu d´après-midi par le même bateau que nous avons emprunté aujourd´hui. Une bonne nuit de sommeil, un petit déjeuner face au lac puis nous partons nous promener avant de rejoindre le petit port, cela se révèle plus sportif ce que nous pensions mais nous arrivons tout de même à temps au débarcadère. Assis face au lac sous le soleil Quechua, nous mangeons un petit morceau quand enfin nous entendons le ronflement du bateau. J´essaye de voir Ivan sur le pont du bateau, il est là. Séquence émotion. Quelques photos du héros et enfin nous pouvons nous embrasser comme deux amis qui ne sont pas vu depuis longtemps et qui se retrouvent à l´autre bout du monde connu. Ivan et Anne-Cécile sont enchantés de nous revoir jusqu´à ce que nous arrivions à l´escalier inca que nous allons devoir emprunter jusqu´à l´hôtel. Heureusement que l´amitié ne s´arrête pas aux contingences topographiques, et sans rancune il paye sa tournée arrivé à l´hôtel. Je ne sais pas trop ce qui nous est arrivé ce soir de retrouvailles, l´altitude, l´émotion mais à 21 heures nous sommes tous sous nos couvertures. Dès le lendemain, remis de nos émotions, munis de nos sacs à dos, nous partons le cœur alerte direction le nord de l´île pour rejoindre quelques ruines laissées par nos amis précolombiens. Une nouvelle fois la topographie de l´île nous surprend. Nous faisons un détour par une petite crique qui ralonge un peu le parcours mais ça valait le coup et Stan en profite pour se baigner dans les eaux glacées du lac. Nous n´arriverons sur le site qu´aux environs de 16 heures et affamés, victimes d´une dame qui vendait beaucoup trop cher ses victuailles, nous avons préféré jeuner et nous contenter de quelques biscuits que Laetitia avait dans son sac plutôt que d´encourager cette doudou à voler le touriste affamé et peu prévoyant. Nous prenons tout de même un peu de temps pour visiter le site, pour nous asseoir sur un banc face à l´immensité du lac, de la berge 100 mètres en contre bas monte la douce mélodie d´une flûte. L´histoire où la légende raconte que les premiers incas seraient originaires de l´île.
Comme il était à prévoir nous nous perdons sur le chemin de retour, ce qui nous permet d´admirer le coucher de soleil de la crête de l´île et de voir le soleil illuminer la Cordillère Real et ses neiges éternelles. Deux heures après la tombée de la nuit frigorifiés et le ventre criant famine, enfin nous arrivons. Nous trouvons une auberge avec un four à pizza qui chauffe toute la salle principale. Jamais je n´aurais mangé une pizza aussi bonne.
D´Isla del Sol, nous repartons tous ensemble à Copacabana et d´où nous prenons la direction de l´île d´Anapia, une île beaucoup moins touristique qui se trouve du côté péruvien sur le petit lac Titicaca. La frontière franchie nous prenons un taxi qui nous dépose 30 kilomètres plus loin sur un port de plage où trois barques sont échouées. Une dame qui vient d´arriver avec son bateau nous informe que quelqu´un devrait peut-être repartir pour Anapia dans l´après-midi. Assis sur nos sacs nous attendons, espérant que ce que nous a dit la dame soit vrai. Une heure plus tard, un vieux bonhomme arrive et nous demande d´embarquer nos affaires sur sa barque plus à moteur qu´à voile. A bord une femme, deux gamins et le marin d´eau douce. Trois bonnes heures plus tard, nous sommes sur la place du village. Sur l´île il n´y a pas d´hôtel et ce sont les habitants qui hébergent les rares touristes de passage. Nous prenons contact avec Francisco, qui nous trouve deux familles pour nous loger. Nous pensions être ensemble, dommage. Notre famille est un peu étrange, le chef de famille est le directeur de l´école et a nommé son chien Hitler, dit-il parce que le nom est connu de tous... malaise immédiat. Heureusement la famille d´Ivan est beaucoup plus sympathique et nous organisera un pique-nique le lendemain sur une petite île située juste en face et où les gens d´Anapia vont pour cultiver leurs champs et s´occuper de leurs vigognes. C´est un animal proche du Lama mais beaucoup plus élégant et qui possède au niveau du poitrail deux touffes de poils qui sont récoltées tous les deux ans. On en fait la laine la plus recherchée et la plus chère du monde. Anapia est un île très sympathique bien que ses habitants soient un peu étranges. Un soir, en train de boire des coups dans l´arrière cour d´une petite épicerie, assis sur des caisses de bières et discutant avec les gens de l´île... la conversation n´avait de cesse de revenir sur Poutine et Sarkozy. Entre ça et notre famille qui appelle son chien Hitler, sans parler du flic du village qui se met à nous parler de cocaïne et qui s´éclipse cinq minutes et revient plus en forme que jamais, nous nous interrogeons sur la santé mentale de ce peuple insulaire. De plus les îles d´agriculteurs à tendance narco-fasciste c´est sympa, mais bon deux jours de ce régime totalitaire sont bien suffisants. Nous reprenons la barque et trois heures plus tard nous sommes sur le continent direction Puno, grosse ville sur la côte ouest du lac. Le soir nous sommes au restaurant pour fêter le départ d´Ivan et d´Anne-Cécile le lendemain. Nou
s choisissons pour l´événement un bar chic, cher et touristique. Nous y entrons à six heures et en ressortons cinq heures plus tard, repus et enivrés par l´alcool et l´altitude. En dehors de nous il n´y aura eu qu´un autre client dans le restaurant qui a eu le courage de commander un cuy, le plat national. C´est un cochon d´Inde, met très prisé des andins et qui est servi entier, donc avec la tête.
Le lendemain nous faisons nos adieux, mais pour Ivan ce n´est qu´un au revoir, nous avons prévu de nous retrouver dans une quinzaine de jours à Iquitos.

Nous décidons
de rester encore deux jours à Puno. Nous glanons quelques infos sur des coopératives de café, mais nous ne trouvons pas d´endroit à visiter de façon aisée dans la région ; nous récupérons tout de même quelques adresses, notamment à La Merced qui est un haut lieu du café péruvien. Faute de pouvoir assouvir notre soif de café, nous faisons du tourisme. Nous nous rendons sur les îles flottantes qui se trouvent aux larges de Puno. Ce sont des îles confectionnées avec plusieurs couches de roseaux complétées au fur et à mesure. Elles sont arrimées pour éviter que le vent ne les déplacent et peuvent faire deux mètres d´épaisseur. En dehors de la beauté des lieux, nous serons extrêmement déçus par l´organisation du tour. Nous arrivons en premier lieu sur une île où nous attend un jeune homme qui nous explique comment sont fabriquées les îles, parfait pour le côté technique, mais pour le côté historique rien. Puis nous nous rendons en barque sur une autre île où ne nous attendent que de petites boutiques de souvenirs construites à la mode de chez eux, paille et jonc. Nous sommes bloqués sur cette petite île, alors que nous voyons qu´il y en beaucoup d´autres à voir. Le capitaine consentira à nous faire faire un tour rapide en bateau avant de regagner Puno. Le lendemain nous continuons nos pérégrinations touristiques en nous rendant à Silustani, lieu ou les Aymaras puis les Incas construisirent des tours funéraires appelées Chullpas ; ces tours étaient réservées aux nobles, les plus hautes pouvant atteindre 12 mètres de haut. Sur le retour un couple d´américains d´Alaska avec chauffeur, nous prend en stop, la pluie menaçant nous sommes bien contents. Nous nous arrêterons pour visiter une ferme formée d´un petit mur d´enceinte où s´accrochent de petites maisons possédant chacune une fonction, cuisine, chambre, buanderie, clapier... nous aurons droit à une dégustation : fromage frais sur lit d´herbes, patate et quinoa. De retour à Puno, nous aurons le privilège de voir la ville sous un déluge d´eau... c´est le signe que nous devons prendre la route dès le lendemain direction Cusco.